mardi, juillet 26, 2011

Retour sur images


<< La pluie se mit à tomber pendant que nous montions l'escalier. Au début, c'était un vent tiède et humide, qui fit frissonner les pétales des petites fleurs blanches et rouges dans les pots, puis quelques taches apparurent sur les pierres sèches. Elle pensa alors qu'allait tomber une de ces averses violentes qu'elle avait vues tant de fois à Cuba. De ces averses cubaines où l'on ne sait pas à quel moment la pluie commence à tomber, où toute la ville semble soudain prise dans la tempête, où les routes deviennent en un instant rivières, où les gouttes de pluie viennent exploser contre le pare-brise. Comme si elle lisait ses pensées, Isabella murmura:
"Les pluies sont douces, à Trinidad." >>



* * *

<< [...] Nous allions sortir du lacis de ruelles de Habana vieja. Les maisons aux murs écaillés comme une peinture abstraite, les gens qui marchent en poussant leur vélo, les gamins qui jouent sur un tas de gravas, et parfois, d'une maison avec patio, des feuilles de bananier qui ondulent au vent de l'autre côté d'un portail en forme d'arche. Il n'y a rien de plus beau que le vert tendre presque transparent des feuilles de bananier sous un soleil puissant. Les nervures blanchâtres qui bougent doucement au vent ont l'air vivantes.
< [...] La maison où nous allions n'était plus loin. Comme toujours, les rues de la vielle cité de La Havane étaient très encombrées, et je dus faire progresser la Mercedes très lentement en klaxonnant sans arrêt. Piétons et cyclistes marchant au pas, flâneurs discutant le coup debout ou assis dans la rue, attroupements devant une voiture le capot ouvert au milieu de la rue, ceux qui essaient de faire la réparation sur place, ceux qui s'attroupent autour pour regarder, carrioles de marchands de fruit ou de boisson au citron, gamins et chiens courant dans tous les sens.
< Un liquide comme de l'huile goutte sur le pavé de la voiture en panne. La voiture est une américaine des années cinquante, la peinture écaillée est recouverte de plusieurs autres couches de peinture, cela lui donne l'air d'être couverte de motifs abstraits.


< [...] La chaleur sourd des pavés au sol et des maisons en pierre sur les côtés, sans issue pour s'échapper. Un air humide et lourd semble coller aux pierres qui couvrent tout l'espace autour de nous. Une chaleur dense s'engouffre dans la voiture et me voilà moite de sueur. J'ai l'impression que c'est toute la rue qui transpire. Moi, j'aime bien cet air lourd de la vieille cité de La Havane.

< [...] La chaleur accumulée dans la journée s'échappe lentement des pierres des maisons, les soirs d'été, dans la vieille cité de La Havane. Le jour, la lumière du soleil frappe avec la violence de véritables coups de poing, mais la nuit, la chaleur de l'intérieur des maisons inonde le corps comme de fines particules. Les murs, le toit, le sol de pierre libèrent leur chaleur et celle-ci se répand par les tapis, les papiers des murs, le verre des lustres. Nous étions arrivés à La Havane au crépuscule, et je ne m'étais pas aperçu que la nuit était arrivée... >>

Murakami Ryû
" Thanatos "



Photo extraite de la série "2010 in photos" du Boston Globe, prise le soir-même où Caroline, Roger et moi découvrions pour la première fois La Habana et essuyions nos premiers orages tropicaux.

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